Mon quartier parisien

Dans cet abécédaire d'un baby-boomer, au travers de souvenirs personnels, j'évoque des lieux que j'ai connus ou dans lesquels j'ai vécu. De ma naissance après la guerre à la fin des années soixante, j'ai résidé chez mes parents à Paris à l'angle du boulevard Saint-Marcel et de la rue Geoffroy Saint-Hilaire, à la limite du 5ème et du 13ème arrondissement.

Cette chronique rassemble des évocations limitées dans ce temps et dans cet espace.

 

La partie de la rive gauche à laquelle je vais me référer comprend (dans le sens des aiguilles d'une montre) : 

  • au nord est le Jardin des Plantes et la gare d'Austerlitz près de la Seine,
  • à l'est le boulevard de l'hôpital et la rue du banquier, siège des automobiles Delahaye, 
  • au sud la place d'Italie donnant sur l'avenue des Gobelins,
  • au nord ouest la rue et le quartier Mouffetard.

Le boulevard Saint Marcel au centre du plan est celui qui concentre le plus de références puisque c'est ici que se situaient à la fois mon domicile et mon école communale.

La ligne rouge sur le plan correspond aux limites du 5ème et du 13ème arrondissement (au sud).

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans les textes qui suivent, les mentions en italique et en bleu constituent les liens vers des chroniques spécifiques sur le site baby-boomer, liens auxquels il est possible de se référer pour plus de matière sur chacun des sujets abordés.

 

Il est vivement conseillé d' ouvrir une nouvelle fenêtre: il sera ainsi plus aisé de retrouver le fil du présent récit après consultation de chaque chronique

 

Les reliefs du passé du quartier Saint Marcel

Carte quartier fin 19ème siècle

 

 

Le quartier Saint Marcel a été le siège du marché aux chevaux jusqu'au début du 20ème siècle ainsi qu'on le voit sur cette carte postérieure à la percée du boulevard dans le cadre des grands travaux de Georges Eugène Haussmann.

Une réalisation des ateliers Dimpre
Une réalisation des ateliers Dimpre

Seules demeurent aujourd'hui des traces de ce passé rue Geoffroy Saint-Hilaire, rue perpendiculaire au boulevard Saint Marcel en son milieu. Dans les années cinquante, il subsistait une fabrique de voitures à chevaux au 36 du boulevard, à quelques immeubles de celui où je résidais.

On trouve une autre trace de ce passé sur les bouteilles de limonade Dumesnil du nom de son propriétaire à partir de 1840, Georges Dumesnil. L'entreprise était initialement située rue Duméril, dans le prolongement de la rue Geoffroy Saint-Hilaire, côté 13ème arrondissement.  

Cette marque, qui avait pour logo une tête de cheval, a d'abord été rachetée puis a disparu.

Les façades

Les façades du boulevard Saint Marcel sont haussmanniennes, atteignent six étages et sont généralement sans fioritures ostentatoires.

Les seuls quatre bâtiments plus bas qui existaient dans les années cinquante, à l'exception de la clinique des gardiens de la paix, ont disparu, remplacés par des immeubles d'un bon standing : la façade de ce qui est devenu "la clinique du sport", trois commerces et une usine jouxtant mon école et, côté 13ème, deux cinémas.

Façades lépreuses dans le 13 ème

 

Des îlots très pauvres demeuraient alentour, particulièrement dans le 13ème, là où seront édifiées des tours. Un "lavoir industriel" ouvert à tous subsistait encore au début des années 60 (également remplacé par un immeuble) vers la place d'Italie (je ne peux le situer plus précisément). 

 

 

L'incendie des studios Jenner rue Jenner (studios de Jean-Pierre Melville) en juin 1967 donne accessoirement à voir en arrière-plan quelques bicoques miséreuses

A l'ouest de l'avenue des Gobelins, mon quartier accueille la première tour de logements construite dans la capitale, la tour Croulebarbe du nom de la rue où elle est implantée et du square Albin-Cachot (couramment dénommé Croulebarbe) dont elle est proche (en vert sur le plan).

Construit de 1958 à 1960, cet "immeuble de grande hauteur" (IGH) précède donc la forêt de tours qui sera construite plus au sud du 13ème arrondissement, le quartier d'affaires de la Défense et la Tour Montparnasse.

Par rapport à ses descendantes, la "grande hauteur" de cette tour est toute relative puisqu'elle ne compte que 23 niveaux. 

Elle n'en est pas moins incongrue par rapport aux bicoques qui l'enserrent.

Plaque demandant aux locataires de se déclarer passées 22h

Pour accéder aux immeubles comme le nôtre, le jour, on compte sur la vigilance de la concierge et, la nuit, la porte étant fermée, on la réveille avec le cordon. Il arrive que la sonnette attachée au cordon ne la réveille pas...

Avant la fin des années 50, le cordon disparait mais il faut encore claironner son nom au passage.   

Tentures mortuaires

Les enterrements donnent lieu à des cérémonies religieuses et à l'installation de tentures arborant l'initiale du nom du défunt sur les portes des immeubles.

 

Les ordures ménagères

Labyrinthe jardin des plantes

Ce grand monticule que l'on voit s'enfler en longeant le Jardin des Plantes rue Geoffroy Saint-Hilaire est certes un labyrinthe mais c'est initialement un immense tas d'ordures comme il s'en créait aux abords du centre de Paris quand la ville occupait un périmètre beaucoup plus restreint. 

Dans les années 50, on n'en est plus là et le traitement des ordures des arrondissements du sud de la capitale est à la pointe du progrès : à Ivry sur Seine, elles sont incinérées et la chaleur ainsi dégagée est utilisée pour le chauffage urbain. Et pour ramasser ces ordures : des camions électriques...

Le rond-point de la place d'Italie

La place d'Italie en 1955
La place d'Italie en 1955

Dans les années 50-60, les ronds-points sont extrêmement rares en France. Dans mon quartier, la place d'Italie (en bas du plan), carrefour de 9 voies dont les avenues des Gobelins et de l'Hôpital est configurée en rond-point. Ses contours se sont dessinés au 18ème siècle et elle a adopté sa forme actuelle au 19ème.

Avec son rond-point, la place d'Italie est presque aussi vaste que la place de l'Etoile : 200 mètres contre 240.

Ici pas d'arc de triomphe mais un jardin avec au centre bassin et jet d'eau ... un lieu étrange auquel quasiment personne n'accède en dépit d'une circulation automobile sans commune mesure avec celle du 21ème siècle. 

L'école communale Saint-Marcel

Mon école communale est "de garçons". Une "de filles" doit se camoufler quelque part mais je ne sais vraiment pas où. Ce qui est devenu le collège Raymond Queneau et qui, évidemment, accueille aujourd'hui filles et garçons, au 66 du boulevard Saint Marcel, est inchangé (du moins vu de l'extérieur).

J' ai appris là notamment l'art des pleins et des déliés et la géographie de nos colonies.

 

Photo de classe première année école

Mes résultats de "formation primaire" sont  brillants (cela changera après ...). J'alterne prix d'honneur et prix d'excellence année après année (avec cérémonie de remise de livres, discours du directeur et Marseillaise), et ce en dépit de performances  très moyennes en gymnastique.

Enfants faisant des exercices aux barres

 Les enseignants se comportent ici en entraineurs et confondent  exercice physique nécessaire à un bon équilibre de tous et compétition glorifiant les zigotos les plus  spectaculaires.

 

Il suffit de regarder de nos jours les actualités télévisées pour constater que cette confusion entre sport de compétition et activité physique raisonnable n'a pas disparu ...

Les cultes

Un confessionnal en bois

Mon quartier a la particularité d'accueillir la grande mosquée de Paris et, à deux cent mètres de là, la congrégation des soeurs Rosalie, lesquelles perpétuent une tradition d'assistance que ce soit dans leur dispensaire ou en se rendant chez leurs ouailles. 

Elles ne passent pas inaperçues, coiffées de leurs cornettes blanches, une tradition qui disparaitra dès les années soixante avant que les soeurs ne disparaissent à leur tour.

Cette période est aussi celle de mon éducation religieuse, de l'assimilation laborieuse du catéchisme, des messes en latin et des séances de confessions en l'église Saint-Médard, au pied de la rue Mouffetard.

Les commerces de bouche

Il n'existe dans le quartier aucun "supermarché alimentaire" si petit soit-il. Cela changera à la toute fin des années soixante avec la reprise par Champion du cinéma Saint-Marcel. Pour s'approvisionner, il n'y a pas d'autre moyen que de cheminer de boutique en boutique. J'évoque ici les commerces à proximité immédiate de notre domicile. Le buvard pour les vins Hauser (à destination des enfants qui, on l'a vu, ne sont à l'école autorisés qu'à l'encre et à la plume) est distribué par le magasin éponyme.    

La rue Mouffetard abrite de nombreux et différents commerces de bouche. Parmi ceux-ci, des triperies comme celle dont on discerne l'enseigne à la gauche de cette photographie prise en 1955.

Ces commerces exclusivement consacrés à la commercialisation des abats se raréfieront progressivement au point qu'en 2021, il n'en restera plus une seule à Paris intra-muros.

En bas de la rue Mouffetard et jusqu'au bas de la rue Monge, une autre source d"approvisionnement :

les marchandes de quatre saisons utilisant des charrettes à bras qu'elles chargent tôt le matin aux Halles de Paris dans le 1er arrondissement. 

 

On voit ici l'une de ces marchandes au pied de la rue Mouffetard (à droite l'église Saint Médard). 

 

Le transfert des Halles à Rungis (banlieue sud) marquera la fin des marchandes de quatre saisons en 1969.

Les autres commerces

Livreur de pain de glace
Livreur de pain de glace

Il était nécessaire de conserver tous ces aliments et, les réfrigérateurs étant peu répandus, on avait recours à des vendeurs de pains de glace (des glacières). L'une de ces glacières - où mes parents s'approvisionnaient au début des années 50 - était située rue de la Collégiale, une rue perpendiculaire au boulevard Saint Marcel à proximité du carrefour des Gobelins, côté 5ème arrondissement).

Ce type de commerce a disparu en France avec l'"équipement des ménages" mais il subsiste dans des pays économiquement moins développés.   

Enseigne du marchand de couleurs

D'autres commerces, à Paris comme en province, sans disparaître intégralement, se sont considérablement raréfiés. Ainsi en est-il des drogueries et marchands de couleurs. Le commerce "couleurs" qui était quasiment au pied de notre immeuble n'a pas résisté au développement des plus grandes surfaces de vente. 

Disque 78 tours de Patachou

Au début des années cinquante, les disques sont distribués le plus souvent comme des produits annexes par des vendeurs/réparateurs de TSF comme celui résidant au 52 du boulevard. Les commerces exclusivement dédiés à la distribution de disques, les disquaires, comme celui créé au 2 rue Poliveau, à l'angle du boulevard de l'hôpital,  ne se développent que dans les années 60. A partir des années quatre-vingt, le nombre de disquaires diminuera sensiblement. Les deux commerces précédemment mentionnés ont d'ailleurs disparu.   

Bougnat rue Laplace 5ème en 1956
Bougnat rue Laplace 5ème en 1956

Il y avait à proximité immédiate de notre domicile deux bistrots, dont l'un jouxtait mon école communale (les règlements d'alors ne devaient pas l'interdire) et l'autre à moins de 100 mètres. Certains assuraient aussi la vente de charbon (alors très utilisé). C'étaient des bougnats comme celui situé rue Geoffroy Saint-Hilaire. Deux de ces bistrots ont disparu, remplacés par des constructions nouvelles, le troisième est devenu une pizzeria. La même raréfaction s'observe dans tout le pays.        

Place de la Contrescarpe, en haut de la rue Mouffetard, face au cabaret La Contrescarpe, un bistrot se distingue au milieu des années 60 par le Beaujolais nouveau du pays de son patron et, pour quelque temps encore, par ses trois billards dans l'arrière salle. C'est d'ailleurs son nom.

 

On ajoutera à ces commerces devenus rares chapeliers et modistes (au moins deux sur le boulevard Saint Marcel), modistes qui pouvaient confectionner les coiffes des catherinettes.

Vitrier à Paris en 1954

Si l'on trouve encore des droguistes, des disquaires, des bistrotiers et des modistes, il n'en va pas de même des colporteurs, lesquels, héritiers d'une longue tradition, étaient très présents dans les artères de la capitale lorsque j'étais enfant. 

Les vendeurs de tapis qui, échappant à la vigilance des concierges, grimpaient dans les étages des immeubles avec leur lourd chargement, faisaient aussi partie du décor. 

Le kiosque du Canon des Gobelins vers 1955
Le kiosque du Canon des Gobelins vers 1955

Je n'aurai garde d'omettre la distribution de la presse qui faisait alors la part belle aux "mercerie-journaux" comme ce commerce disparu qui était tenu par un vieux couple, à mi-parcours du domicile familial et de l'école communale.

Le même sort a été réservé à de nombreux kiosques, dénommés également barnums, dont celui du canon des Gobelins à l'angle de l'avenue du même nom et du boulevard Saint Marcel.  

Jeunes filles apprenant la dactylo

Dernière évocation très marquée par l'époque, celle d'une école de dactylo située côté treizième arrondissement du boulevard Saint Marcel.

La dactylographie est alors un métier conseillé aux filles (et pas aux garçons). Elle est enseignée dans de nombreux cours privés et des concours de rapidité sont organisés. Cette école, comme bien d'autres, disparaitra avec l'émergence de l'informatique.  

Les halles

La halle aux vins peinte par Paul Cézanne

Aujourd'hui, lorsque l'on évoque les halles, on ne pense généralement qu'aux halles alimentaires et aux pavillons Baltard. Les plus férus mentionneront peut-être la halle aux vins de Bercy.

Cependant, jusqu'aux années 60, il existait dans le cinquième arrondissement , également près de la Seine mais sur l'autre rive, une autre halle aux vins, la plus ancienne. Paul Cézanne l'avait peinte en 1890. Elle serait remplacée par la Faculté des Sciences Jussieu et par l'Institut du Monde Arabe.

Halle aux cuirs en cours de destruction

Plus près du domicile de mes parents, une autre halle, odoriférante celle-là, la halle aux cuirs, serait elle aussi remplacée par une Faculté : Censier. Celle-ci est tellement oubliée qu'elle est absente d'internet (pas de photos durant ses dernières décennies, si ce n'est à l'occasion de sa destruction).

Les établissements industriels

Logo Delahaye

Les établissements industriels sont encore très présents dans les années 50-60, plutôt petits dans le 5ème arrondissement, souvent très importants dans le 13ème. Cependant, le mouvement qui avait vu s'implanter à Paris et dans son pourtour de nombreuses firmes au 19ème siècle a amorcé son reflux. Dans le "périmètre" défini pour mon quartier parisien, les automobiles Delahaye, créées à Tours et "montées à Paris" pour se développer rue du Banquier depuis 1898, disparaissent en 1954. 

Les spectacles

Téléviseur

Jusqu'au milieu des années 50, les téléviseurs sont commercialisés à des prix très élevés et sont donc rares.

Ici comme ailleurs, la télévision se regarde dans les vitrines des magasins de TSF, un privilège si l'on considère que beaucoup de régions ne peuvent encore dans les années 50 capter les quelques heures d'émissions quotidiennes.

Cinéma Jeanne d'Arc

Boulevard Saint Marcel, on compte deux cinémas. Le cinéma Jeanne d'Arc, non loin de la statue, est presque en face de notre immeuble. Bien d'autres "cinémas de quartier", notamment avenue des Gobelins, affichent leurs différences.   

Maison pour tous

Mon quartier n'est pas riche en théâtres : seule la maison pour tous, 76 rue Mouffetard, donne sporadiquement, entre autres spectacles, des représentations.

 

Cela se développera dans les années 60 avec l'installation dans la Maison pour Tous de la Communauté Théâtrale à l'initiative de Raymond Rouleau et avec l'ouverture du fameux café-théâtre de la Vieille Grille derrière la Mosquée de Paris.

La Maison pour Tous, qui menaçait ruine, sera démolie en 1967. 

Dans les années 50-60, de nombreux cabarets sont créés (puis disparaitront ou perdront leur caractère) dans le 5ème arrondissement et plus particulièrement de la rue Mouffetard à la Seine , comme le cheval d'or entre la place de la Contrescarpe et l'Ecole Polytechnique. 

De nombreux auteurs-compositeurs interprètes, chanteurs  et fantaisistes, y font leurs premières armes. 

Les stigmates des guerres

billet de loterie des gueules cassées

Ma génération n'a pas eu à "faire la guerre" mais a été témoin de ses stigmates. A Paris, durant mon enfance, il n'y avait pas de trace de la guerre 39 45. En revanche, les gueules cassées de 14 18, qui atteignaient alors la soixantaine, se rencontraient, seuls ou en groupes, dans le quartier Mouffetard. La loterie nationale leur avait concédé un tirage spécial.    

Harkis en patrouille dans le 13 ème arrondissement

Autre présence humaine dans le quartier témoignant d'une autre guerre : celle des harkis contrôlant leurs compatriotes quand la fin des "événements" approche au début des années soixante. Cela se passe plutôt dans le 13ème (il y a relativement peu de travailleurs algériens dans le 5ème). Le souvenir que j'en conserve se situe avenue des Gobelins, non loin de la place d'Italie.

En 1961 et 1962, la guerre est également présente en France par les attentats fomentés par les activistes de l'OAS, tenants du maintien d'une Algérie française. 

Mon quartier n'y échappe pas avec le plastiquage de la gare d'Austerlitz

Les moyens de transport

Rue Geoffroy Saint-Hilaire vierge de tout véhicule

Après la guerre 39 45, il y a encore peu de voitures dans les rues de Paris. La meilleure preuve que je peux fournir est une photographie aux côtés de ma mère rue Geoffroy Saint-Hilaire : dans cette rue du 5ème arrondissement, donc du centre de Paris, on ne discerne aucune voiture en circulation ou en stationnement.

 

Peu de véhicules mais une mortalité routière considérable ... C'est un autre sujet qui s'étend hélas largement au-delà du  cadre de mon quartier.

Triporteur Peugeot

Pour les livraisons, les attelages à chevaux se font rares tandis que des bougnats ne rechignent pas à utiliser des voitures à bras et que les automobiles pas nécessairement utilitaires et que les triporteurs dotés ou non de moteurs acheminent les marchandises aux commerces de bouche et, marginalement, aux particuliers. 

 Autobus 67

L'autobus¨67 s'arrête au pied de notre immeuble, côté rue Geoffroy Saint-Hilaire. J'apprécie particulièrement sa plate-forme lorsque je l'emprunte avec mon père pour nous rendre au bazar de l'hôtel de ville (devenu BHV avec la mode des acronymes).

Le 67 utilise le plus vieux modèle encore en service. Les autres autobus qui desservent le boulevard (dont le 91), ne sont cependant guère plus récents. 

Métro années 50

Le métro a également peu évolué depuis les années trente. Seuls les sièges du wagon de première classe sont dotés de moleskine, les autres wagons de deuxième classe se cantonnant au bois. En 1956, la ligne Châtelet-Mairie des Lilas (en dehors de mon quartier) est équipée de pneus. Les deux lignes qui desservent les extrémités du boulevard (Gobelins et Saint Marcel) conservent encore aujourd'hui des roues métalliques.

Gare d'Austerlitz

La gare d'Austerlitz ne diffère guère des autres gares parisiennes : les locomotives électriques voisinent avec les locomotives à vapeur. Ici, en outre, on note la présence de l'autorail qui a pour terminus Vendôme, un autorail jaune et rouge pareil à ceux que l'on trouve en province. La gare est, comme les autres, dotée d'un buffet qui, avec ses serveurs, a tout d'un restaurant.   

La Seine

Péniche de l'armée du salut face gare d'Austerlitz

Au pied du pont d'Austerlitz qui franchit la Seine, à proximité immédiate de la gare du même nom,  la péniche de l'armée du salut est amarrée à la fin des années 40. Elle accueille des hommes en déshérence mais nombre d'entre eux, que l'on nomme clochards (pas SDFs) continuent de s'abriter sous les ponts. A partir de la fin des années 50 et singulièrement dans les années 60, nombre des berges sont transformées en autostrades.

La Bièvre

Dans les égouts, plaque mentionnant son cours drue Croulebarbe

La Bièvre, second cours d'eau parisien qui traverse mon quartier des Gobelins jusqu'à la Seine au pont d'Austerlitz ne se montre plus que dans le réseau des égouts.

Dans les années cinquante, les réminiscences de ceux qui l'ont connue avant son recouvrement total à Paris en 1912 la rendent cependant bien présente.

Le jardin des plantes

L'auteur en voiture à pédales au jardin des plantes vers 1950

L'entrée à l'extrémité est du jardin des plantes est située juste en face de la gare d'arrivée, de l'autre côté du boulevard de l'hôpital, à l'opposé de l'entrée que nous empruntons au pied de la rue Geoffroy Saint-Hilaire, à peu de distance de notre domicile (cf. le plan au début de cette chronique). 

 

Le jardin des plantes est pour moi un terrain de jeu habituel et, surtout, un gigantesque circuit sur lequel j'exerce mes talents d'automobiliste à pédales puis de patineur à pédale (modèle de patinette alors courant, aujourd'hui disparu).

Le jardin des plantes (et des animaux de sa ménagerie) a peu changé si ce n'est qu'au muséum d'histoire naturelle, à la place de la grande galerie de l'évolution, il y avait  une sorte de réserve vieillotte dans laquelle on pénétrait par une porte étroite en façade (comme au Louvre avant la pyramide).

Autre différence : les allées étaient parsemées de sièges et fauteuils en fer et parcourues avec ténacité par de vieilles dames, des chaisières, qui s'efforçaient de surprendre les "clients" afin d'encaisser des redevances (elles étaient plus chères pour les fauteuils).

 

Comme les poinçonneurs du métro et des bus, comme les serveurs des buffets de gare, les chaisières ont disparu, ôtant leur part de vie au décor de mon enfance.    

Chronique publiée initialement en juillet 2017

complétée en aout 2018, en février, avril et décembre 2020, en janvier, avril et juin 2021