Edicule

1960 Abri-pub

"Le terme de mobilier urbain est associé au publicitaire Jean-Claude Decaux et aux abri-bus qu'il a progressivement répandu en France – et ailleurs – à partir des années soixante. On observera que ce mobilier urbain-là n'est pas plus mobile que ne le sont les mobile-homes qui envahissent progressivement les terrains de camping.

Avant de juger de la valeur architecturale de ce type d'édicules, force est d'admettre qu'ils répondent à un besoin réel (pas celui d'abriter l'autobus comme le suggère le terme créé par le publicitaire) et que ce besoin n'était guère couvert, si j'ose dire, auparavant."

Le 91 à la station Observatoire dépourvue d'abri
Le 91 à la station Observatoire dépourvue d'abri

"Les arrêts de bus parisiens dont je garde la mémoire n'étaient dotés d'aucun abri. Les voyageurs attendaient sous les intempéries avec l'unique assurance , à certains arrêts, de pouvoir justifier auprès du contrôleur-poinçonneur de leur ordre d'ancienneté dans la file grâce à un distributeur de tickets en séquence croissante sur le poteau supportant l'indication des lignes desservant l'arrêt.

Dans les archives de la RATP, j'ai ainsi trouvé une photographie de voyageurs patientant en nombre à l'arrêt Val de Grâce, du 91, l'un des autobus passant au pied de notre immeuble."

Abri massif à La Défense
Abri massif à La Défense

"Cependant, une autre photographie montre un abri massif réalisé devant le palais des expositions de la Défense. Au vu des véhicules pris dans le champ, la photo date de la fin des années cinquante, à une époque ou les tours du «quartier d'affaires» n'avaient pas été érigées et ou le publicitaire Jean-Claude Decaux n'avait pas encore élaboré la justification économique finançant l'édification et l'entretien de ces édicules par le recours à l'affichage payant.

Avait-on jugé que la perspective du CNIT pouvait supporter cette coexistence ou bien que l'affluence de visiteurs justifiait ici l'installation d'une protection particulière? Toujours est-il que cette pesante réalisation venait à l'appui de l'argumentation qu'allait avancer le publicitaire: légèreté et discrétion à défaut d'ambition architecturale et de prise en compte de la spécificité de l'environnement."

Abribus place de l'Opéra
Rencontre Garnier - Decaux

"Cette option a minima atteint néanmoins ses limites quand par exemple l'édicule réputé discret voisine avec la débauche de styles à dominante baroque de l'Opéra Garnier et de son mobilier urbain, en l'occurrence de ses lampadaires. Même constatation lorsque la fonctionnalité brute de l’abri-pub se trouve dans le champ de vision de la luxuriante décoration des bouches de métro d'Hector Guimard.

Un mobilier urbain réduit à la plus simple expression de ses ambitions limitées : abriter les voyageurs de la pluie (à condition que des rafales de vent ne la propulsent pas sur les côtés à claire-voie) et mettre en valeur l'affichage publicitaire contrepartie du service ainsi rendu."

"Ainsi, en 2014, la créativité des concepteurs d'abri-bus se concentre sur l'attractivité du message publicitaire avec notamment l'utilisation de la réalité augmentée.

 

Entre le choix du fonctionnel supposé passe-partout (mais au bout du compte pas forcément) et celui d'un édicule possiblement incongru, les services chargés de la protection des sites choisissent parfois de s'abstenir.

Ainsi, à Orléans, les personnes qui empruntent le nouveau tramway à proximité de la cathédrale Sainte-Croix sont-ils privés d'abribus (d’abri-tram si l'on préfère)."

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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