Essentiel
2020 Essentiel incernable
" L'adjectif «essentiel» associé à déplacement apparaît à l'annonce du premier confinement lié au coronavirus du 17 mars au 11 mai. Pour illustrer cette période, la photographie d'une rue de Rivoli déserte me semble la plus significative. Cette rue, je l'avais fréquentée deux ans durant, de 1971 à 1973, alors que je travaillais dans les étages qui surmontaient les grands magasins du Louvre (fermés en 1974). A toute heure, cet axe est-ouest majeur de Paris accueillait un flux incessant et mugissant de véhicules de tous calibres.
Déplacements non essentiels, sans doute aurait-il fallu s'en tenir à cette association de mots. L'extension du qualificatif aux produits et plus encore aux commerces et entreprises (dont les «entreprises culturelles») suscita des réactions compréhensibles – et très prévisibles – de la part de ceux dont l'activité pouvait désormais être considérée comme accessoire, secondaire voire négligeable.
C'est, une fois de plus, une raison de s'interroger sur le professionnalisme des prétendus «experts en communication» qui créent ou laissent ainsi se créer un malaise dont on se serait bien dispensé dans ces circonstances dramatiques.
Durant ce premier confinement, tous les rayons du supermarché de ma commune restent accessibles tandis que des commerces proposant des produits similaires doivent fermer.
Le deuxième confinement qui commence le 30 octobre débute sur les mêmes bases mais, face aux protestations des commerçants, il est rapidement décidé de fermer l'accès aux rayons de produits non essentiels.
Réactions des non-essentiels, TF1, 29 10 2020, 6 minutes 20
On voit ainsi considérés comme produits non essentiels et délimités par les rubans blancs et rouges des scènes de crimes les pyjamas des enfants (qui continuent à grandir), les chaussures et les chaussons (qui s'usent) tandis que les fleurs naturelles (qui fanent) sont en vente libre à l'inverse des fleurs artificielles (pour lesquelles point ne serait besoin de revenir …).
Ce n'est pas le moment de se priver en plus de quelques douceurs mais l'on pourrait, en d'autres temps, s'interroger notamment sur la nécessité des dizaines de mètres de galeries de produits laitiers aux emballages affriolants (et consommateurs de ressources difficilement recyclables). Pas question de priver les gourmands et pas question non plus de sevrer les dépendants: distributeurs de tabacs et de supposés substituts «vapotables» restent ouverts tandis que librairies et musées (notamment) gardent rideaux fermés.
Avec les mesures adoptées en février 2021 (mois d'écriture de cette chronique), une nouvelle formule sera en vigueur, applicable aux espaces commerciaux fermés de plus de 20000 mètres carrés: tous les rayons du supermarché de ma commune resteront ouverts tandis que les commerces non alimentaires des deux galeries attenantes seront fermés. Ainsi devrai-je délaisser mon coiffeur habituel dans l'une de ces galeries au profit d'un autre à quelques dizaines de mètres de l'entrée de cette galerie mise en quarantaine.
Un essentiel à géométrie variable décidément incernable ... "
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Chronique publiée le 1 mars 2021
Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer
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