Bamboche
2021 Danse de mort
" Pour légitimer le titre de cette étape décrite en janvier 2021, titre sans rapport aucun avec l’œuvre de l'écrivain suédois, il est nécessaire de rappeler quelques données d'une année 2020 marquée par la propagation de la pandémie dûe au coronavirus.
Alors que la France n'a pas encore pris la mesure du péril et n'a en conséquence adopté aucune «mesure-barrière», 2500 personnes venues de tout le pays se réunissent dans un local clos à Mulhouse en février. Un mois plus tard, des médecins s'accordent à estimer que quelques personnes positives au virus en ont contaminé environ 2000, lesquelles ont à leur retour propagé la contagion dans leurs entourages locaux.
Ils ne sont à l'évidence pas responsables de la pandémie mais leur foyer de contagion (cossardement répété cluster par la plupart des media) l'a incontestablement accélérée et rendue plus incontrôlable.
A l'aube de 2021, le bilan de la pandémie se solde en France par:
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2,7 millions de personnes contaminées,
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67000 décès (et combien de survivants souffrant de séquelles?) malgré l'engagement de soignants épuisés,
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une dette publique alourdie de centaines de milliards d'euros (dépenses directes, pertes de recettes fiscales et emprunts garantis par l’État dont une part ne sera pas recouvrée du fait des faillites),
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des situations personnelles difficiles voire dramatiques et des secteurs entiers de l'économie sinistrés en dépit des aides consenties (en France plus qu'ailleurs).
Covid-19 : ce que coûte à l'État la crise sanitaire et économique, La Tribune, 4 11 2020, texte
Face à cette situation, le gouvernement a décidé de maintenir le couvre-feu en vigueur la nuit du jour de l'an, de proscrire les réunions de plus de 6 personnes en continuant à imposer les «gestes-barrières» au premier rang desquels le port du masque qui, faute d'approvisionnements, avait été si tardivement rendu possible en mai.
Dans ce contexte, le rassemblement le dernier jour de 2020 de 2500 personnes (le même nombre qu'en février dernier) pour une rave party sauvage par nature et par destination m'a instantanément inspiré ce titre.
Images lugubres d'une sinistre "fête"
A midi le 1 janvier, l'un des organisateurs se défend «on n'oblige personne à venir» et, dans la même phrase, «on assume».
Sans qu'une grande démonstration soit nécessaire, assumer, ce devrait être accepter le délit de mise en danger de la vie d'autrui, pas seulement de celle des déhanchés assourdis mais encore celle de tous ceux qui auront après la malchance de les côtoyer.
Le délit dit de mise en danger de la vie d’autrui, Village justice, texte
La suite judiciaire en janvier démontrera que la courageuse déclaration d'intention se transformera en pitoyable pantalonnade.
La «fête» se poursuit jusqu'au 2 janvier (deux nuits).
Entre temps, des gendarmes ont été repoussés manu militari et un de leurs véhicules incendié.
Le Préfet d'Ile et Vilaine, qui n'a visiblement pas assimilé la différence entre masque chirurgical et bâillon orthopédique, intervient à l'heure du repas pour se féliciter du départ des fêtards et de la verbalisation liée au virus de «plus de 800 personnes».
Le préfet d'Ille-et-Vilaine sur la rave party, BFMTV, 02 01 2021, 2 min.
Est-il besoin de rappeler que les estimations s'accordaient sur une participation de l'ordre de 2500 personnes. La différence tient sans doute au fait que le grillage qui enserre la propriété et longe une voie rapide a été découpé et que la poudre d'escampette (une autre poudre...) a permis de contourner le sas de contrôle des forces de l'ordre. Au total, la gendarmerie annoncera un peu plus tard 1600 verbalisations dont 420 «infractions diverses», une bonne moitié «en lien avec des stupéfiants».
Sur le plan préventif, le résultat est encore moins brillant: seulement quelques dizaines de personnes acceptent de se prêter au test auquel on les invite, test qui ne prend que quelques minutes, et l'on distribue à ceux qui empruntent la sortie réglementaire des prospectus contenant des conseils en comptant sur leur esprit de responsabilité pour les appliquer …
Le 5 janvier, les organisateurs prennent la parole ou, plus exactement, adressent un texte anonyme au journal Libération. Ils trouvent à redire au sujet d' «un malaise créé par l'absence d'espace de culture et de sociabilisation (qui) engendre de graves conséquences sur la population».
Un «malaise» qui a donc une «conséquence sur la population» plus dommageable que la propagation d'un virus qui peut conduire au transit par la case réanimation, voire pire?
Avec présomption, ils revendiquent «un geste politique» et avec indécence ils clament «nous sommes fiers d'avoir pu redonner le sourire à quelques milliers de personnes».
Ou se nichent les raisons d'être fiers et y a t'il matière à sourire en la circonstance?
Le 8 janvier, quatre suspects «connus de la justice pour des infractions liées à la législation sur les stupéfiants» sont appréhendés.
Fin janvier, les investigations se poursuivent
Cinq nouveaux organisateurs présumés mis en examen, Franceinfo, 22 1 2021, texte
mais de nombreuses questions demeurent posées au sujet de cette bamboche de sinistre mémoire. "
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Chronique publiée le 1 février 2021
Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer
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