Richesse

1955 C'était moins ostentatoire avant

"En août 1955, les Actualités Françaises, les actualités présentées chaque mercredi pour une semaine aux entractes dans les salles des cinémas, proposent deux brefs reportages. Le premier nous donne à voir des «déshérités» accueillis, à l'initiative de l'Abbé Pierre sous des tentes plantées au niveau du pont Sully à Paris. Le second nous transporte sur le champ de courses de Deauville ou, «aujourd'hui comme hier», l’Aga Khan côtoie élégantes à chapeaux et autres «non-déshérités».

Château Renaissance de Jean-Paul Getty

A l'évidence, le contraste est saisissant mais les deux reportages ne sont pas présentés les mêmes semaines et rien n'est dit des écarts de fortune … ou d'infortune.

Ces écarts, on peut s'en faire une certaine idée en visionnant des reportages consacrés à des milliardaires à commencer par celui dédié à l'homme le plus riche du monde en 1961, Jean-Paul Getty. Cet Américain vit dans un château Renaissance à proximité de Londres, un château de 60 pièces sur des centaines d'hectares acquis 600 millions de francs (120 millions de nos euros) et qui dispose en outre d'une vaisselle en or massif à 40 millions d'euros.

Jean-Paul Getty en couverture du TIME

Pour autant, protestant et austère, l'homme n'a rien d'un m'as-tu vu. On comprend qu'il a accepté la visite d'un journaliste Français mais ne l'a pas recherchée. A 68 ans, son château est son lieu de travail bien gardé, pas exposé aux regards des envieux.

En 1965, Marguerite Duras interviewe un autre milliardaire Français pour l'émission Dim Dam Dom. Celui-ci n'a pas la réserve du précédent: héritier lui aussi, il a fait prospérer sa fortune avec une «combine» (c'est son expression) qui a consisté à raser l'hôtel particulier ou il était né pour y construire un juteux parking. Il vend de tout, des œufs, des voitures d'occasion, des meubles anciens ... Il a une autre façon ne pas afficher sa richesse: il a abandonné le château familial pour un pavillon passe-partout.

Vue partielle de la collection Schlumpf

 

Dernière illustration de ces fortunés qui font prospérer leurs affaires sans afficher d’outranciers signes extérieurs de richesse: en 1977, les filatures de frères Schlumpf sont déclarées en faillite et l'on découvre à cette occasion que ceux-ci avaient patiemment constitué une collection inestimable de voitures anciennes pour leur seul plaisir (dépenses inconsidérées à l'origine de leur faillite?).

 

L'impression générale qui se dégage de ces traces audio-visuelles est celle de fortunes tout aussi incommensurables (pour le commun des mortels) que celles constatées à notre époque. Toutefois, la bienséance - ou la prudence - ne semblaient pas inciter leurs détenteurs à en faire outre mesure état."

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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