Nucléaire civil

2011 Tsunami idéologique

"La réputation de qualité des productions japonaises s’ancrait durablement à partir du début des années quatre-vingt. Elle inquiétait les entreprises du monde entier dans un environnement de concurrence internationale croissante. Dans mon entreprise multinationale, l’heure était aux cercles de qualité et l’on allait chercher l’inspiration auprès des professeurs Ishikawa, Genichi, Tagushi … En peu d’années, le Japon était passé d’un statut de mauvais imitateur dépourvu d’imagination à celui d’un maître vénérable, place qu’il n’a guère quitté depuis lors, démontrant sa capacité à appliquer les préceptes de qualité aux domaines les plus variés."

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"Le Japon avait partagé avec la France le choix d’une énergie nucléaire dominante. Comment aurait-on pu s’en inquiéter outre mesure compte tenu de la réputation qu’il avait acquise mais aussi de la conscience du péril nucléaire que ne pouvaient manquer d’avoir présents à l’esprit les Japonais après Hiroshima et Nagasaki ?

S’il était un pays ou le risque devait être réduit à sa plus simple expression, c’était bien le Japon."

 

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"Les images des hélicoptères déversant des baquets d’eau de mer sur les installations fumantes me rappellent tragiquement celles de Tchernobyl, une catastrophe que l’on avait alors attribué à un régime en déliquescence, incapable de réaliser des produits fiables ainsi que l’illustraient les automobiles en provenance des pays de l’est, le plus souvent reléguées aux derniers rangs des classements pour leur fiabilité, ce alors que les automobiles japonaises accaparaient déjà la tête du classement."


"Un an après cette catastrophe, on peut tirer le bilan factuel suivant :

• 80 000 habitants ont été évacués pour des décennies (c’est-à-dire définitivement pour ce qui les concerne) jusqu’à 20 kilomètres de la centrale;

• La zone peu ou prou contaminée s’étend bien au-delà comme le montrent des reportages réalisés à 60 kilomètres de Fukushima. On peut ainsi voir une cour de récréation dont on enlève une épaisse couche de terre … pour la déposer à quelques mètres de là, faute de savoir quoi en faire;

• Du côté de l’océan pacifique, fin 2011, les premiers déchets du tsunami atteignent la côte ouest des Etats-Unis. Il se peut que certains soient radioactifs, ce qui étend considérablement le périmètre « à risque »;

• Des équipes se relaient jour et nuit sur les restes du monstre et l’on estime qu’il faudra quarante ans pour le maîtriser définitivement."

"Un bilan auquel il convient bien entendu d'ajouter le nombre indéfini - d'aucuns diraient incalculable - des victimes à venir ("ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés ..." - Les animaux malades de la peste, Jean de la Fontaine)".

"Pour risquer une comparaison, on peut aisément conjecturer ce qui se passerait si un accident du même ordre survenait à Dampierre en Burly ou à Saint Laurent des Eaux, deux centrales au bord de la Loire à sensiblement moins de 60 kilomètres à vol d’oiseau d’Orléans et de sa périphérie très urbanisée."

 

"...à côté de solutions nucléaires de plus en plus pharaoniques et supposées rentables en dépit d’investissements colossaux, des pistes sont défrichées localement par des citoyens isolés disposant de moyens infiniment plus modestes à tous égards.

Ainsi la communauté de communes du Pays de Mené dans les Côtes d’Armor (7 communes comptant moins de 7000 habitants au total) s’est donné pour objectif de parvenir à une indépendance énergétique totale (du nucléaire et du pétrole) à l’horizon 2030 et a déjà parcouru une part du chemin .

Aux désormais classiques solutions des éoliennes, du chauffage au bois et de l’utilisation d’huile de colza, elle ajoute celle de la méthanisation par fermentation du lisier de porc afin de produire localement de l’électricité.

La méthanisation des déchets agricoles de natures diverses ne constitue pas ici une expérimentation : elle est déjà utilisée à l’échelle de fermes isolées particulièrement en Allemagne."

"Dans les entreprises, le slogan « small is beautiful » a fait flores dans les années écoulées. Pourquoi ne pourrait-il pas s’appliquer à la production de l’énergie dont nous avons besoin ? "

 

Chronique publiée en mars 2012

Année 1953 complétée en janvier 2019

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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