Interlude

1962 Train bouche-trou

Même la pendule change ...
Même la pendule change ...

 

"De 1956 à 1962, l’audience de la télévision croît à un rythme accéléré. Le personnel affecté à la télévision augmente, les moyens techniques également. Cependant, comme les innovations technologiques se succèdent avec leur inévitable lot de déboires, la nécessité des interludes ne se dément pas." ...

"En 1962, à l’Eurovision créée en 1954, s’ajoute la Mondovision grâce aux satellites relayés par la station de Pleumeur-Bodou. Comme les satellites ne sont pas encore géostationnaires, il faut interrompre les programmes au moment précis où le satellite passe en vue du radome, autre source de perturbation… 1962 voit également le début du jeu « Intervilles » réalisé une soirée entière en direct depuis deux villes françaises."

"Pour faire face à ces nouvelles sources potentielles de malfonctionnement, un tournant radical a été pris en 1960 en matière d’occupation de l’antenne durant les périodes intérimaires inopinées : le petit train rébus de Maurice Brunot."

Publicité pour le modèle réduit du petit train (jouet)
Produit dérivé ...

"Aux séquences volontairement neutres, voire insipides, de la première époque des interludes, séquences dont l’interruption ne pouvait frustrer personne, a succédé une émission spécifique dotée d’un scénario, d’un début et d’une fin.

Sur le flanc de chaque wagon figure la pièce d’un rébus et il faut donc être passé du tender (c’est un train à vapeur comme il en existe encore à la SNCF en 1962) à la queue du train pour avoir le fin mot de l’histoire.

L’autre intérêt que l’on peut trouver au petit train est du même ordre que celui qu’un non-amateur du spectacle cycliste éprouve en suivant les étapes du tour de France : celui d’observer le décor dans lequel le petit train chemine (un département, une ville)."

"Par contre, ce n’est pas l’originalité musicale qui retient le téléspectateur : il s’agit toujours du même fond sonore gnangnan et répétitif. Il se peut que j’exprime là une opinion très minoritaire car en 1962, avec une composition tout aussi banale et une orchestration curieusement analogue, Françoise Hardy connait le succès avec « Tous les garçons et les filles»."

"Une autre source d’étonnement rétrospectif tient dans le choix d’investir dans un programme visant à mieux faire accepter des anomalies de fonctionnement plutôt que dans des moyens permettant de les réduire. Cet étonnement grandit encore quand on sait que, depuis 1959, des petits films publicitaires qui ne disent pas leur nom ont été réalisés pour supporter des causes nationales comme celle d’avoir toujours chez soi des petits pois. Pourquoi dès lors ne pas boucher les trous intempestifs avec ces séquences d’une publicité dite compensée ? (33 ans plus tard, l’interruption délibérée des programmes par la publicité sera bien institutionnalisée …)."

"Le petit train aura une longue vie. En 1968, on le verra traverser le Lot en couleurs sur la deuxième chaîne et en 1971 sur une première chaîne encore en noir et blanc visiter les grands chantiers de la capitale."

"Avec l’arrivée de la deuxième chaîne en 1967 offrant la possibilité d’un choix et celle de la publicité en 1968 suscitant le désir de changement de programme, s’ouvrira le règne de la zapette (nouvel outil et nouveau mot créé pour les besoins de la télévision), une zapette que l’on pourra désormais utiliser pour échapper aux pérégrinations ferroviaires …

Le petit train, qui avait troqué son rébus pour un exercice de mémoire visuelle avec l’ambition de devenir international, sera remisé en 1974."

 

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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