Habits

1955 Culotte courte, cravate à élastique

Moi habillé comme décrit dans le texte

" Les photos qui me représentent en buste quand je suis un enfant sont celles d’un adulte en réduction portant gilet en V sur une chemise claire ornée d’une cravate. Ce que l’on ne voit pas, c’est l’élastique qui enserre le col et auquel est suspendu le court morceau de tissu qui fait office de cravate.

 

Il faut passer aux photos de groupe pour dévoiler le bas, lequel marque ma jeunesse par une culotte courte surplombant des chaussettes qui grimpent haut, culotte courte que je ne porte d’ailleurs pas seulement dans les périodes de grande chaleur. Je suis – au moins pour le haut - le décalque de l’adulte tel que mes parents souhaitent me voir devenir (chemise blanche et cravate, marques d’une « bonne situation »)."

Photo de classe 1952

"Ainsi ficelé, je ne me différencie d’ailleurs guère de mes condisciples de l’école communale de garçons du boulevard Saint-Marcel ainsi qu’en attestent les photos de classes (pour cet évènement annuel que constitue la venue du photographe, les tabliers gris étaient ôtés).

Une séquence du journal télévisé en 1958 confirme cette absence de spécificité de la mode enfantine : on y voit défiler des petites filles portant jupe évasée et chaussettes blanches avec des bibis et des foulards que ne dédaigneraient pas les dames patronnesses qui assurent mon éducation religieuse. Le jeune garçon chargé de présenter cette « nouvelle mode enfantine » (Antoine de Caunes en l’occurrence) n’est pas mieux loti, engoncé dans son pesant pardessus en tweed, casquette anglaise assortie vissée sur les oreilles."

...

" Dans les années cinquante, la haute couture rayonne. Elle vit de sa production annuellement renouvelée sans devoir utiliser la renommée de ses marques pour commercialiser toute autre chose afin de survivre. Comme aujourd’hui, elle ne s’adresse pourtant qu’à une infime minorité de la gent féminine. Ma mère et les femmes de son entourage s’efforcent de suivre cette mode avec les moyens à leur portée, lesquels se résument soit à assurer la confection par elles-mêmes, soit à avoir recours à de « petites couturières » à la renommée on ne peut plus locale, des personnes qui oeuvrent dans leurs appartements, souvent clandestinement.

 

 

" Dotée d’une machine à coudre mécanique OMNIA commercialisée par la Manufacture des Armes et Cycles de Saint-Etienne (Manufrance), ma mère tire profit des patrons-modèles et de la science couturière que lui inculque « Le Petit Echo de la Mode ». Le tirage de 1 700 000 exemplaires qu’atteint cet hebdomadaire dans les années cinquante est révélateur de la pratique alors très répandue de la confection domestique ."

Femmes portant des chapeaux CHA

...

" Le chapeau constitue alors un attribut majeur de la vêture des dames. Boulevard Saint-Marcel ou nous résidons, un boulevard haussmannien d’une longueur mesurée, je garde en mémoire la présence d’au moins deux boutiques de chapeliers modistes (en sus de la boutique du tailleur). Le chapeau étant d’usage courant, ces modistes ont une clientèle de quartier très éloignée de celle de la haute couture. Ma mère, comme les autres femmes pas spécialement exubérantes que je côtoie, n’hésite pas à l’occasion à porter des coiffes surprenantes, voire audacieuses.

En cas de deuil d’un proche, le chapeau devient un accessoire obligé. Il est alors beaucoup plus sobre, noir et doté d’une voilette assortie qui masque les traits du visage. Les hommes s’en tiennent dans ces circonstances à des costumes sombres, voire pour le moins au port d’un liseré noir au revers du veston."

...

" Dans mon proche entourage, d’autres costumes sont utilisés pour différencier les rôles sociaux de leurs détenteurs."

" ... à commencer par celui de ma tante Camille, sœur de mon père âgée d’une quarantaine d’années, franciscaine à Perrou dans l’Orne. Sa tenue marron, tête recouverte d’un ample foulard flottant, est bien sobre comparée à celle des sœurs Rosalie que je croise quotidiennement dans le quartier."

...

" Leurs démesurées cornettes blanches amidonnées me font irrésistiblement penser aux oreilles de l’un de mes héros : Mickey."

Soeur Rosalie avec coiffe à cornettes

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

Pour faire un commentaire, une suggestion, une critique, cliquez sur ce lien